est-ce qu’on a le droit de faire Tsédaka la nuit
Réponse :
Il semble qu’il y a un certain malentendu concernant cette injonction de ne pas donner de charité la nuit. Comme nous allons le voir, il ne s’agit pas d’une interdiction mais d’une recommandation dans la mesure du possible, lorsqu’il n’ya pas urgence.
Mais il est évident que lorsque l’on est sollicité est qu’une occasion se présente, il ne faut pas prendre le risque de perdre la Mitsva.
Le Birké Yossef du ‘Hida (O.H. 235) écrit que ‘Arvit est un moment de rigueur et qu’il n’est donc pas propice à la Tsédaka. Il dit cela au nom des élèves du Ari Zal. Mais il rapporte aussi au nom du Mahari Tséma’h qu’une Tsédaka faite à ce moment n’engendre pas les mêmes effets bénéfiques qu’en journée. Ce qui en ressort est donc qu’il ne s’agit pas d’un interdit à proprement parler, mais d’une comparaison entre les effets optimales d’une Tsédaka faite le jour, par rapport à une Tsédaka faite la nuit. Dans les deux cas, il s’agit d’une Mitsva, et non des moindres, mais dans l’ordre d’importance, le jour prime.
D’autant plus qu’un texte des Avot de Rabbi Natan (chap.3) dit clairement que si un pauvre se présente la nuit, il ne faut pas le négliger. Est-ce en contradiction avec ce qui vient d’être dit ? Non, car plusieurs réponses permettent de résoudre ce problème. Premièrement, il est possible que l’injonction de donner la Tsédaka la nuit ne soit pas à prendre au pied de la lettre et qu’il ne s’agisse pas véritablement de la nuit mais un peu avant. Secondement, il est possible qu’il faille faire une différence entre un pauvre qui se présente à nous, auquel nous devons porter notre aide, et un trésorier qui récolterait de l’argent, que nous pouvons aider le lendemain en journée, si c’est encore possible. Enfin, comme nous l’avons suggéré plus haut, il n’est pas interdit de donner la nuit, bien au contraire : si un pauvre se présente il faut l’aider. Il y a juste un ordre d’importance quant à la qualité d’une charité faite le jour ou la nuit lorsqu’il n’y a pas urgence.
D’autant plus qu’une Guémara dans Sanhédrin (page 35a) semble indiquer que celui qui ne donne pas la Tsédaka la nuit d’un jeûne est coupable d’un grave crime.
D’autres suggèrent une différence entre un don visible, et un don fait dans une boite de Tsédaka, de manière anonyme, ce qui est permis.
Il est bon de souligner que certains témoignent que le ‘Hatam Sofer donnait la Tsédaka discrètement avant chaque prière, y compris celle d’Arvit. Voir Minhagué ‘Hatam Sofer (chap.1). Cela confirme qu’une Tsédaka discrète est autorisée, voir souhaitée, y compris la nuit.
Le Rachba dans l’une de ses réponses (tome 7, chap. 51) a été questionné au sujet de celui qui a fait le vœu de donner chaque jour une pièce de monnaie, peut – il s’acquitter de son devoir la nuit ? Il répond que dans le langage courant, « chaque jour » inclut également la nuit. Encore une preuve qu’il n’est pas interdit de donner la Tsédaka la nuit.
Rappelons que le Sefer Ha’hinoukh précise que la Tsédaka est une Mitsva qui s’accomplit à chaque endroit et à chaque moment, lorsqu’elle se présente à nous. Celui qui n’accomplit pas à ce moment son devoir peut mettre en danger le pauvre, comme la Guémara le raconte à propos du célèbre Ich Gam Zo.
Certains Tsadikims, lorsqu’ils faisaient un don la nuit à une institution, précisaient que l’acquisition par l’institution se feraient légalement le lendemain matin uniquement. C’est une mesure de piété, mais nullement obligatoire, comme nous l’avons démontré.
Pour plus de détails, consulter Chout Divré Bénayahou du Rav Bénayahou Dayan, tome 16, chapitre 17.