Question :
Il m’arrive de recevoir le Chabat plus tôt que les autres. Si, pour une raison ou une autre je regrette car je m’aperçois que je dois faire une Mélakha importante, puis je annuler cette réception personnelle du Chabat ?
Réponse :
Celui qui a reçu le Chabat, peut-il annuler sa décision par une Hatarat Nédarim ? Par exemple en convoquant trois érudits et déclarer les formules de regret ? Le Beth Yossef (chapitre 263) rapporte l’opinion du Rachba (Chabat page 151a) disant que celui qui a reçu le Chabat peut demander à son ami qui, lui, n’a pas encore reçu le Chabat, d’effectuer un travail interdit. Le Rachba s’appuie sur un enseignement de la Guémara de Chabat où il est dit qu’il est permis de dire à un ami « surveille mes fruits se trouvant dans ton domaine et moi je surveillerai tes fruits se trouvant dans le mien ». (Configuration où la personne est empêchée d’aller surveiller ses propres fruits parce qu’ils se trouvent au-delà d’une distance qu’il lui est interdit de franchir Chabat.)
Autrement dit, je peux demander à un ami de réaliser une action qui m’est interdite mais qui lui est permise. Il en serait donc de même dans le cas qui nous concerne. C’est la même problématique.
Le Ran objecte : les deux cas sont différents ! Dans le cas des fruits, ce n’est que la distance qui constitue un obstacle. Cet obstacle pourrait, ou aurait pu être évité s’il y avait une continuité d’abris habitables au-delà de la distance autorisée, prolongeant cette distance jusqu’à la fin de cet ensemble d’abris ! Alors que dans le cas de celui qui a reçu Chabat plus tôt que son ami, le voilà complétement interdit d’effectuer des travaux le Chabat !
Le Beth Yossef dit ne pas comprendre l’objection du Ran. En effet, le raisonnement qu’il tient à propos des fruits est tout aussi valable concernant la réception du Chabat : si la personne n’avait pas reçu le Chabat, il aurait pu effectuer lui-même le travail en question !
La remarque du Beth Yossef est quelque peu étrange : une fois la personne « bloquée » par sa réception du Chabat, pourquoi se projeter dans un cas où il n’avait pas reçu le Chabat ? c’est trop tard.
A mois que la remarque du Beth Yossef repose sur la possibilité d’annuler la réception du Chabat par l’annulation du vœu.
Certains maitres ont donc conclu de ce qui vient d’être présenté qu’il est possible, selon le Beth Yossef, d’annuler l’acceptation du Chabat en annulant le vœu.
Il faut avouer que ce n’est pas une pratique fréquente. Mais celui qui serait dans une telle situation, pourra donc s’appuyer sur ces avis permissifs.
(le cas échant, il n’est pas nécessaire de trouver trois Talmidé ‘Hakhamims, on se contentera de trois personnes ordinaires dont l’un au moins comprend les tenants et les aboutissants de l’annulation des vœux, pour qu’il puisse expliquer aux autres.
Le Rav Moché Lévi dans Ménou’hat Ahava se montre plus strict. En effet, dit-il, il est difficile de se reposer sur ces opinions tardives alors que le Choul’han Aroukh ne s’est pas exprimé clairement sur le sujet et que ce n’est que par une argumentation déductive que l’on suggère qu’il permettrait. Il faudra donc, selon le Rav Lévi, se montrer strict s’il s’agit d’un travail interdit par la Torah. La réception du Chabat étant elle-même d’ordre toranique, se serait faire preuve de légèreté que de permettre d’annuler le Chabat. En revanche, s’il s’agit d’interdits d’ordre rabbinique, on pourra autoriser comme on le fait généralement lorsqu’il y a un doute ou une discussion portant sur un interdit d’ordre rabbinique.
Il faut souligner que même si l’on considère que la réception du Chabat plus tôt qu’à l’heure règlementaire est d’ordre toranique, si l’on tient compte de l’opinion de Rabénou Tam, pour qui les horaires contraignants sont plus tardifs que selon les autres opinions, alors il est probable que la réception du Chabat soit d’ordre rabbinique.