Réponse :
Il est évident que ce genre de question doit être traitée au cas par cas. Toutefois, comme les décisionnaires ont donné des principes et des recommandations d’ordre général, nous allons les exposer ici. Pour ce, voici un texte de l’un des grands rabbanims francophones actuels, le Rav Cohen Arazi, sur le sujet.
Avancement de l’accouchement
Généralités
Selon les sages de la Guemara, D. prévoit avec exactitude, pour chaque être humain, le jour et l’heure de sa naissance, qui détermineront toute sa vie, la longueur et la qualité de son existence mais aussi l’âme qui l’habitera. Ils en déduisent que provoquer un accouchement par anticipation sans justification médicale entraîne un dommage irrémédiable, souffrances ou mort prématurée, pour l’enfant à naître. La responsabilité en sera attribuée, toujours selon la Guemara, à celui qui aura procédé à ce zirouz (anticipation), autrefois par l’écriture d’un kamia (sorte d’amulette cabalistique), aujourd’hui par les moyens médicaux ad hoc. Cette opération ne se faisant qu’avec l’autorisation des parents, ceux-ci auront leur part de responsabilité dans les conséquences possibles d’un accouchement provoqué non justifié.
Il importe ici de préciser que, selon les sages et en particulier les décisionnaires contemporains, l’accouchement est considéré comme un processus naturel fixé par D., nonobstant l’exégèse des premiers versets de la Genèse relatifs aux conséquences, pour la femme, du ‘het (la « faute » primordiale). Un processus naturel relevant de la volonté divine donc, induit par la Mitsva de croître et multiplier, et voué par là à « bien se passer », dans la plupart des cas du moins, dès lors qu’est respecté le calendrier normal de la grossesse et de son terme. Provoquer un accouchement anticipé, c’est interférer dans ce processus naturel tel qu’il a été programmé par D., et prendre alors le risque de mettre en danger la parturiente.
Motifs non légitimes d’anticipation de l’accouchement
Les motifs non légitimes sont d’abord ceux relevant de la convenance. Souvent les raisons pratiques du personnel soignant s’efforçant de répartir dans le temps les accouchements afin d’éviter les périodes de surcharge. Parfois l’impatience des parents. Ou encore, s’agissant de la naissance prévue d’un garçon, le souci des parents de procéder autant que possible à la Brit-Mila un jour qui leur convient (le dimanche, en général, dans les pays occidentaux) qui peut les pousser à demander, si besoin, d’avancer l’accouchement à la date appropriée.
La date de l’accouchement ne pourra pas être avancée en raison de la nécessité de devoir procéder en tout état de cause à une césarienne, qui sera effectuée au terme normal.
Procéder à un accouchement anticipé Chabbat alors qu’il n’y a pas de recommandation médicale dans ce sens, c’est ajouter la transgression majeure des interdits chabbatiques (tous les actes médicaux qui devront être effectués, y compris et notamment l’injection elle-même, mode opératoire courant pour accélérer un accouchement et porteuse en lui-même de nombreux interdits liés à Chabbat) à la rupture du processus naturel voulu par D.
La méthode dite « stripping » (une forme de stimulation), bien que plus naturelle que la procédure par injection, ne sera pas davantage permise en dehors des cas où la Halakha autorise l’accouchement anticipé.
Motifs légitimes d’anticipation de l’accouchement
Un accouchement anticipé est permis, voire obligatoire dans les cas suivants, y compris le cas échéant pendant Chabbat :
Lorsqu’un danger identifié par le personnel médical menace la mère ou l’enfant. En particulier après la quarante-deuxième semaine de grossesse, considérée aujourd’hui comme un seuil dangereux si l’accouchement n’a pas encore eu lieu.
Lorsqu’il est nécessaire de faire immédiatement prendre en charge l’enfant à naître par un médecin spécialisé, en raison d’une maladie qui aura été détectée par l’échographie. Il peut alors être nécessaire de coordonner le moment de l’accouchement et les heures de présence du spécialiste.
Lorsque l’enfant à naître souffre d’hydrocéphalie, les médecins recommandant alors de provoquer l’accouchement avant que la tête de l’enfant ne soit trop grosse et qu’une césarienne soit alors nécessaire.
Lorsque le processus d’accouchement est déjà enclenché (selon les indices mentionnés plus haut), et que la parturiente, éprouvant de grandes souffrances, réclame la poursuite immédiate du processus, qu’il sera alors possible de provoquer afin de la soulager et la rassurer.
En dehors de ces situations, aucun accouchement anticipé ne sera en principe permis. Si la femme ou son mari jugent néanmoins cette anticipation justifiée par d’autres motifs, ils s’en remettront à l’opinion d’un Rav compétent en la matière.
Précisons également que s’il est procédé à un accouchement anticipé justifié et autorisé, le « Mazal » (la destinée) de l’enfant n’en sera pas affectée, le moment effectif de sa naissance étant alors considéré comme devant être le sien. |