Réponse :
La Guémara dans Kidouchin (81a) dit au nom de Rav Yossef que lorsque l’entrée est ouverte sur le domaine public, on ne craint pas l’isolement.
Selon le ‘Hida, cela signifie que la chose est permise a priori. C’est-à-dire que l’on a le droit de s’isoler avec une femme si la pièce est ouverte sur la rue, par exemple. Cf. Cha’ar Yossef réponse 3.
On aurait croire que cette Halakha veut juste dire que ceux qui s’isolent ainsi ne sont pas passible de punition. Comme Rachi l’indique a propos de la permission du « mari en ville ». Selon Rachi, il ne s’agit pas de dire qu’il est autorisé a priori de s’isoler avec un autre homme que son mari lorsque celui-ci est en ville, mais juste que si cela a été le cas on ne recevra pas la peine des coups. Ici, selon certains, ce n’est pas le cas. L’autorisation lorsque la pièce est ouverte sur la rue serait une autorisation a priori.
Mais ce n’est pas l’avis de tous. Le Tsits Eliezer par exemple (tome 6, chapitre 11) a une lecture du Rambam qui indique que ce n’est qu’a postériori qu’on ne considère qu’il n’y a pas eu d’isolement. Mais que ce n’est pas permis a priori.
Il est probable que cette différence de compréhension provienne d’une lecture différente des mots « Ein ‘Hochéchine » contenue dans le talmud. « on ne craint pas » peut laisser entendre qu’il n’y a rien à craindre, c’est-à-dire que l’on peut s’isoler a priori.
Quoi qu’il en soit, certains comprennent que selon Rachi c’est a priori interdit, comme chez le Rambam. Voir Radbaz (tome 3, chapitre 481) ainsi que Nichmat Kol ‘Hay (tome 2, chapitre 1).
Autre question de taille, qui aura un impact évident sur la réponse à votre question : lorsque la Guémara parle d’une entrée ouverte, veut-elle simplement dire que l’on se suffit d’une porte qui n’est pas fermée à clef, qui n’est pas verrouillée, ou faut- il prendre le mot « ouverte » au sens propre, c’est-à-dire que la porte soit véritablement ouverte ?
La réponse à cette question dépendra apparemment de la raison pour laquelle une entrée ouverte autorise l’isolement. S’il s’agit de s’assurer que l’on puisse voir de l’extérieur ce qui se passe à l’intérieur, alors il est évident que la porte doit être réellement ouverte !
En revanche, s’il s’agit juste de s’assurer que toute personne qui le souhaite puisse pénétrer dans la pièce sans prévenir, alors il suffit que la porte ne soit pas verrouillée.
Le Rachba (Téchouvot tome 1, chapitre 1251), à propos de l’isolement entre une femme de Cohen avec un étranger, a autorisé du moment que les portes ne sont pas verrouillées. Idem pour le Radbaz (tome 1, 121) ou le Mabit (tome 1, 287).
Mais dans le Yérouchalmi a propos de la femme Sota il apparait que l’on laisse la chose dans le doute. Cela dépend en fait de la version que l’on a du Yérouchalmi. Nous n’entrerons pas ici dans les détails.
Il faut savoir aussi que certains ont conditionnés la permission du Rachba à une situation où les gens ont l’habitude de rentrer et sortir sans permission. Ce qui obéit à une certaine logique. Il est normal de considérer qu’un appartement où quasiment personne ne rentrera sans prévenir est un lieu d’isolement.
Au final, on peut considérer, sans établir ici de liste, que les décisionnaires sont assez divisés sur les conditions de l’autorisation de la porte ouverte. Doit – on être dans un cadre où il est possible qu’une personne rentre sans prévenir ou est-ce simplement une situation théorique, presque psychologique, ou le fait que la porte ne soit pas fermée à clef dissuade déjà les personnes à l’intérieur, de commettre une bêtise.
Dans votre cas, et contenu de la discussion évoquée, il est probable qu’il soit davantage facile d’autoriser. En effet, s’il s’agit d’une jeune fille qui n’est pas mariée, l’interdit d’isolement est d’ordre rabbinique et on peut suivre l’avis indulgent. De plus que votre femme est proche et peut venir à tout moment.
Toutefois, il faut rappeler que le bon sens doit aussi participer à votre décision. Si le contexte prête au danger, il vaut mieux s’éloigner de cette situation. Mais sinon, on peut autoriser, comme dit. |