Réponse :
La source de ce problème se trouve dans le traité de Chabat page 51b. On y interdit d’écraser la neige, de casser la glace en petit morceaux, etc.
Selon Rachi, l’action est interdite au titre de Molid, c’est-à-dire le fait de créer quelque chose de nouveau. Cela s’apparente à un travail interdit parce qu’il y a, en quelque sorte, création de l’eau, par l’écrasement de la neige etc.
En revanche, on peut mettre un glaçon dans un verre de vin pour le refroidir.
Le Rachba au nom du Sefer Hatérouma donne un autre nom aux actions évoquées : Nolad. Le fait de « faire naître » quelque chose. Mais alors, demande-t-il, pourquoi est-il permis de mettre l’élément dans un verre ? autre question: lorsqu’un fruit qui n’est pas normalement fait pour en faire un jus, le jus qui s’extrait de lui-même est autorisé. Or, pourquoi ne pas l’interdire au titre de Nolad, comme pour la neige ?
C’est pour cela que le Rachba propose une autre explication: il est interdit d’écraser la neige de peur d’en venir a presser des fruits dont on cherche le liquide, comme les olives ou le raisin. Car la neige ou la glace aussi sont des éléments dont on cherche à en extraire le liquide.
C’est pour cela que si la neige ou le glaçon se liquidifie de lui-même dans le verre, cela est permis, car on s’éloigne de l’action de presser. Ce n’est pas visible.
Les Richonims ont lu dans le Rambam une interprétation identique à celle du Rachba. La preuve en est que le Rambam traite de cette lois dans le chapitre relatif au travail de presser!
Le Choul’han Aroukh lui aussi semble opter pour identifier le travail interdit dans l’écrasement de la neige avec celui de presser. Voir chapitre 307.
Rabbi Its’hak Lampronti (Pa’had Its’hak) déduit du Rambam et du Choul’han Aroukh mentionnés, qu’il est permis d’utiliser du savon (solide) le Chabat, car il ne se transforme pas en haut. Contrairement au Rama (326,9). Le Maguen Avraham fait mention des avis qui permettent.
Voir aussi le Guinat Véradim (Klal 3, chap. 14), juge suprême du tribunal rabbinique en Egypte, qui permet l’utilisation du savon car la mousse n’est pas une nouvelle création, elle se dissout aussitôt après être apparue.
Voir aussi Névé Chalom (Solal). (Chapitre 11).
Ou encore Lachone Limoudim (chapitre 157).
Le Gra (chapitre 326), selon une lecture qu’en fait le Chvitat Chabat, permettrait le savon.
Ainsi que rabbi Its’hak Aboulafia. Juge de Damas.
Pourtant , il y a aussi nombre de décisionnaires qui interdisent d’utiliser le savon. Ainsi en est il du Rav Chlomo Laniado (Syrie) rapporté dans Ma’assé Ich. Ou du Rav Yissa Brakha (grand rabbin d’Erets Israel). Du Ben Ich ‘Hay (Paracha Yitro).
On peut aussi compter le Ma’assé Rokéa’h (chabat 22) qui interdit, mais au titre de Méméréa’h, c’est-à-dire « étaler ». Ou Mémah’ek, aplatir. Certes l’utilisateur du savon ne cherche pas à étaler quoi que ce soit mais simplement à se laver les mains, mais comme l’interdit est inévitable, on rentre dans le cadre de Psik Réché.
Voir aussi Téhila Lédavid (326).
Le Rama, lui, interdit au titre de Nolad. Il n’interdit pas au titre de Mémaréa’h (ce qui en ferait un interdit de la Torah! ). Apparemment, il considère que n’ayant pas besoin de l’aplanissement lui-même, il n’y a pas de problème à ce titre.
Il y a encore bien d’autres maîtres qui ont traité du sujet, aussi bien pour interdire que pour autoriser. Nous ne pouvons tous les rapporter ici. Il s’agit bien de montrer qu’il y a véritablement divergence d’opinion.
Certains font valoir qu’une responsa du Rambam récemment découverte semble autoriser l’utilisation du savon.
En conclusion :
Il est bon de s’abstenir d’utiliser le savon solide le Chabat. En particulier pour les Achkénazes qui suivent l’avis du Rama. Un Séfarade ferait bien de s’interdire la chose également, mais certains autorisent. |