Réponse :
C’est une question importante, qui a été traitée par les décisionnaires les plus classiques. On peut voir un développement dans les ouvrages du Rav Benayahou Dayan, notamment dans le tome 36 chapitre 50. Nous allons nous inspirer de cette Téchouva.
Lorsque l’on traite de cette question, il faut a priori distinguer les montées à la Torah qui ont été instaurées spécialement pour le jour de jeûne, c’est-à-dire les montées au Séfer Torah de la Paracha que l’on lit à Min’ha, des montées du lundi et du jeudi, qui ne sont pas liées au jeûne puisqu’elles sont là tout au long de l’année.
Le rav Dayan rappel qu’étant donné que selon certains faire monter à la Torah une personne qui ne jeûne pas entraine la prononciation de Brakhots en vain, il faut se montrer a priori stricte dans cette situation. Et ne pas faire monter à la Torah un Cohen qui ne jeûne pas.
Meme si le Cohen et bel et bien présent à la synagogue, il est possible d’appeler un Israel et de préciser, en l’appelant, « bien qu’il y ait un Cohen ». Cela ne constitue pas un mépris pour la qualité du cohen (en général on ne fait pas cela car les personnes présentes pourraient se dire que si l’on ne fait pas monter le Cohen alors qu’il est présent, signe que sa qualité de cohen présente un problème ! ). En effet, puisque c’est un jour de jeûne les personnes présentes peuvent tout à fait comprendre que la raison pour laquelle le cohen n’a pas été appelé est qu’il doit manger en ce jour. Etant donné que la raison pour laquelle on se montre stricte est qu’il y a à craindre la prononciation de Brakhots en vain, même si les gens ne sont pas au courant de la raison de la mise à l’écart du Cohen, on ne montrera pas indulgent.
Il est bon de préciser que le Cohen pourra toutefois être appelé à ouvrir l’Arche Sainte ou soulever le Sefer Torah etc. Ce que nous avons dit n’est en effet valable que pour la montée au Sefer Torah.
Cependant, concernant les montées du lundi et du jeudi matin, certains Poskims de renoms considèrent que le Cohen peut tout à fait monter à la torah car ces lectures ne sont pas liées aux jeûnes. Elles ont été instaurées par Ezra Hasofer pour ne pas que les Enfants d’Israel passent trois jours sans lire la Torah. Comme une personne qui ne peut pas rester trois jours sans boire.
Cependant, cette différence, émise entre autres par le Maguen Avraham, n’est pas admise de tous les Posskims. Voir Zéra Emet (chapitre 86), entre autres, qui émet des doutes sur ce ‘Hidouch. Le Rav Dayan, même s’il ne tranche pas catégoriquement contre le Maguen Avraham (somme toute il y a là discussion, décisionnaires contre décisionnaires), recommande du moins, lorsqu’il y a un autre Cohen présent dans la synagogue qui, lui, ne mange pas, de le faire monter. Car pourquoi provoquer une situation non admise par tous les décisionnaires si l’on peut faire autrement !
Voir aussi Or Létsion tome 3, remarques sur le chapitre 31.
Autre précision du Rav Bénayahou Dayan, dans sa conclusion : si l’on a déjà appelé le Cohen, et qu’il a dit les bénédictions, nous sommes dans une situation a posteriori. Dans ce cas-là, on se repose sur les opinions qui permettent y compris a celui qui ne jeûne pas de monter à la Torah. Ce n’est que a priori que l’on doit respecter les avis rigoureux.
L’avis du Rav Mordekhay Eliahou Zatsal est également de se montrer rigoureux lorsque cela est possible. |