Question :
Lorsque j’étais commerçant (dans un quartier juif, en ‘Houts Laarets) il m’est arrivé malheureusement de léser quelques clients. Aujourd’hui je veux faire téchouva mais je ne sais pas à qui rendre l’argent volé ?
Tout d’abord, s’il y a des personnes que l’on peut identifier sans trop de difficulté, on leur rendra bien évidemment ce qui leur a été pris. Nous ne parlons que de ceux que l’on ne connait pas ou que l’on ne connait plus.
A priori la réponse à cette question est relativement simple : il faudra distribuer la somme que l’on pense avoir volé, pour des œuvres qui servent le public. Ainsi, il est possible que les personnes que l’on a lésées mais que l’on ne sait pas identifier, vont, par le fruit du hasard, ou plutôt de la Providence, profiter de ce don.
Le Choul’han Aroukh (H.M chap. 366) énumère ceux pour qui la repentance (après avoir volé) est particulièrement difficile. Il s’agit des bergers, des trésoriers, des encaisseurs d’impôts. En effet, le caractère massif de leur vol fait qu’il leur est impossible de retrouver la trace de tous ceux et celles qu’ils ont volé, et cela, alors que le fait de prendre de l’argent injustement est une de leur caractéristique. Résultat pour eux : la Téchouva s’avère être compliquée. La solution proposée par la Halakha à celui qui ne sait qui pas à qui restituer, et de dépenser l’équivalent de l’argent volé en l’offrant à des œuvres d’utilité publiques (réparations urbaines, etc.) afin d’augmenter la chance que la personne lésée puisse, sans le savoir, profiter du don de son voleur et récupérer en quelque sorte l’équivalent de la somme volée.
La Guémara dans Bétsa nous raconte que Aba Chaoul ben Bitnit a rassemblé 300 tonneaux de vin, vin qui provenait d’un calcul qu’il avait opéré, et qui correspondait à la quantité de vin qui selon lui n’avait pas été donné au client à cause des conditions dans lesquelles ils sont versés dans les ustensiles du client et où la vapeur ou la mousse cache un manque de vin. Ses amis ont fait de même avec des tonneaux d’huile. Ils ont amené le tout au Temple de Jérusalem, chez le trésorier. Les trésoriers leur ont expliqué que cette démarche n’est pas nécessaire car il ne s’agit pas d’un vol, les clients étant conscients que s’ils ne patientent pas suffisamment ils seront légèrement lésés au niveau de la quantité. Mais Aba Chaoul et ses amis affirmèrent qu’ils ne veulent pas profiter de cet argent.
On leur répondit qu’ils ne doivent pas consacrer cela au Temple mais le donner à des œuvres d’utilité publique. Par exemple des puits, etc.
Peut ton donner à des pauvres de la ville ? oui, lorsqu’il fait profiter aussi les riches, puisque les pauvres sont sur leur responsabilité. En donnant aux pauvres on fait donc faire des économies aux riches. En revanche, si la subsistance des pauvres ne repose pas sur les riches, le donateur ne fait réaliser aucune économie.
Il faut aussi rapporter cette précision (et cette nouveauté) du ‘Helkat Yohav : ce n’est que lorsque la personne volée est encore en vie, ou son héritier, qu’il y a un intérêt à donner à une œuvre publique afin d’espérer que la personne volée puisse jouir du don effectué. Mais si la personne n’a pas d’héritier et qu’elle n’est plus de ce monde, à quoi bon chercher à lui faire profiter de cet argent ?! dans ce cas-là il faudra effectivement faire don de la somme à la Tsédaka, ce sera la meilleure destinée possible pour cet argent.
En conclusion, il est difficile de déterminer quels sont les œuvres qui peuvent correspondre aujourd’hui, en France, à ce que la Guémara entend comme Tsorké Tsibour. On essayera de réfléchir à l’endroit où se trouvent la catégorie de personnes que l’on a lésé, et on donnera de l’argent pour participer à la construction ou l’élaboration d’une chose utile à laquelle tout le monde ou presque est amené à profiter. |
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