Question : Quelles sont les sources interdisant de recevoir la Tsédaka des Goyims car cela retarderait la délivrance finale ? y a t-il une explication pouvant être communiquée à des personnes éloignées de la religion ?
Réponse : il est écrit dans la Guémara de Sanhédrin page 26b au nom de Rav Na’hman, que ceux qui mangent de la viande interdite, sont invalides au témoignage, et cela, quand ils le font publiquement, et qu’ils pouvaient le faire discrètement. Le Choul’han Aroukh (H.M chap. 34 §18) ajoute également celui qui reçoit la Tsédaka de l’idolâtre publiquement.
Et ce, car ils se donnent en mépris, et sont par cela invalidés par les Sages.
On peut lire dans Baba Batra page 10b que Ifra, la mère du roi Chavor, a envoyé 400 dinars à Rabbi Ami, qui ne les a pas acceptés. Alors que Rava, lui, les accepta, pour être en bon terme avec les autorités. Mais Rabbi Ami, lui, soutenait que lorsque le mérite des idolâtres s’estomperait (y compris celui engendré par la Tsédaka) alors eux aussi se briseraient. Quant à rester en bon terme avec le roi, il suffisait pour cela de distribuer l’argent à des indigents idolâtres.
Le Rambam dans les lois de dons aux pauvres (Matnot ‘Aniyim chap. 8, §9) stipule qu’il est interdit à un juif de prendre la Tsédaka de l’idolâtre publiquement, et si la Tsédaka du juif ne suffit pas à le faire vivre, et qu’il ne peut pas se montrer discret quant à recevoir l’argent de l’idolâtre, il lui sera alors permis de la recevoir. Le Choul’han Aroukh lui au chap. 254 § 2 écrit qu’un notable idolâtre ayant envoyé de l’argent à un juif en tant que Tsédaka, on ne le lui rend pas, et ce pour des raisons de paix avec les autorités. Mais on peut le remettre directement à des pauvres idolâtres, de sorte à ce que le notable ne soit pas mis au courant. Le Rama toutefois amène une opinion selon laquelle il faudra utiliser l’argent aux fins voulues par l’expéditeur. Et d’ajouter que tout ceci est valable dans la mesure où l’argent envoyé l’est en tant que Tsédaka, mais s’il s’agit d’un don à la synagogue, on l’acceptera.
Le Chakh explique que si l’argent à été envoyé sans préciser à qui il doit être donné, tous seront d’accord qu’il devra être distribué aux nons-juifs. La discussion est dans le cas où le gouverneur a explicitement demandé à ce que l’argent soit remis à des pauvres juifs, que certains avancent qu’il faudra le faire. Et ce, car il est interdit de tromper serait-ce un Goy.
Le Taz pose une question : si l’on ne doit pas engendrer un mérite au Goy, alors pourquoi est-ce permis lorsque cela est fait dans la discrétion ? Le Dricha répond à cette question : le particulier profite de ce don, donc il lui est autorisé de le recevoir. Mais un trésorier qui n’a pas de profit personnel n’ajoutera pas de mérite au Goy pour le profit des autres. Mais le Taz est sceptique : pourquoi permettre le profit personnel si cela peut avoir un effet non souhaitable ?
C’est pourquoi il répond par une idée lumineuse : lorsque l’envoi est destiné aux pauvres d’Israel il est clair qu’il y a une volonté de faire profiter les juifs (les Goyims aussi, si ce n’était pas le cas on n’aurait pas permis de ne distribuer qu’au Goyims pauvres !) et cela peut donc engendrer un mérite important. Alors que lorsqu’un seul juif est l’objet d’un don, cela peut relever d’une compassion à l’égard de toute personne dans le besoin, qu’elle soit juive ou non ! Ce n’est donc pas un si grand mérite.
Le ‘Aroukh Hachoul’han propose une autre explication : la différence n’est pas tant entre l’individu et le groupe. En fait, être dépendant de la Tsédaka des Goyims est tout simplement honteux. C’est pour cela que c’est interdit. Quant au verset indiquant que c’est un surplus de mérite pour les Goyims, ce n’est qu’une source allusive mais pas la vraie raison. C’est pour cela que lorsqu’il n’y a pas le choix, la chose est permise.
Une autre explication est rapportée par le Chiyouré Brakha : alors que les vœux et les offrandes bénévoles des Goyims sont acceptés, la Tsédaka, elle, ne l’est pas, car elle a une fonction expiatrice, ce qui n’est pas le cas des autres dons.
Le Aroukh Hachoul’han ajoute qu’aujourd’hui nous acceptons sans résigner les dons des non juifs, d’autant plus qu’il n’y a plus d’idolâtres parmi nous. (Concernant les chrétiens, il faudrait réfléchir).
Conclusion : a priori on ne recevra pas l’argent des Goyims car cela leur ajoute du mérite et retarde la Guéoula. A moins que l’argent ait déjà été envoyé, alors on le distribuera à des Goyims. S’il a été formulé explicitement que cet argent est destiné à des juifs, on leur remettra. Idem si l’on n’a pas de quoi vivre et qu’il n’est pas possible de recevoir cet argent dans une totale discrétion.