Réponse :
On peut dire que les premières sources concernant l’interdit de vendre un bien immobilier à un idolâtre sont la Michna et la Guémara de ‘Avoda Zara page 19b et suite. La source biblique est l’injonction Lo Té’honem, comprenant, entre autres, l’interdiction de donner une ‘Hanaya, c’est-à-dire une résidence fixe, à l’idolâtre.
Il y a plusieurs situations, desquelles découlent plusieurs lois, en rapport avec cet interdit. On consultera, entre autres, le Choul’han Aroukh Yoré Déa chapitre 151, avec les commentaires classiques. Pour cette présente réponse, venons-en directement aux conclusions pratiques.
Si le non juif ne pratique pas l’idolâtrie, on pourra lui vendre le bien immobilier. C’est ce que pense le Rachba (Téchouvot chap.8) ou encore le Péri Haadama, le Ralbag, et peut être même le Tour.
Même si le non juif se trouve être un idolâtre, on peut autoriser en se reposant sur les dires du Kaftor Vafera’h, qui autorise la transaction lorsque, si elle ne se faisait pas, engendrerait une perte pour le juif. Cette situation peut se présenter, par exemple, lorsque si le bien n’est pas vendu rapidement le propriétaire risque de perdre des aides gouvernementales qui lui auraient permis d’acquérir un nouveau bien là où il le souhaite. Ou encore, lorsque les prix baissent de jour en jour et qu’aucun potentiel acheteur juif ne s’est manifesté.
(Il existe un cas où il y a une raison -éventuellement supplémentaire- d’autoriser, qui fait l’objet d’un développement dans le Yachiv Its’hak (tome 3, chap. 14). Il s’agit du cas où la vente se fait à un couple mixte, où la femme est juive mais pas le mari. Si la vente se fait au préalable uniquement à la femme, il n’y a pas de problème. Certes, selon certains décisionnaires, un tel couple obéit également au principe qui veut que ce qu’une femme acquiert est automatiquement acquis à son mari. Or celui-ci n’est pas juif. Mais, en réalité, ce ne sont que les « fruits », c’est-à-dire les bénéfices rapportés par le bien, qui vont au mari. Le bien lui-même, reste la pleine propriété de la femme, qui, rappelons-le, est juive. Autre précision importante : même si, par la suite, dans le contrat officiel, c’est-à-dire celui reconnu par l’état, la vente est faite aussi au mari, ce n’est pas grave, du moment qu’une vente halakhiquement valable a été effectuée auparavant, uniquement pour la femme. Il ne nous est pas possible de s’étendre ici sur ce sujet.)
Autre situation et raison d’autoriser la vente y compris lorsqu’il s’agit d’un idolâtre : le non juif a déjà un lieu d’habitation qui lui appartient, en Erets Israel. En lui vendant un nouveau bien, on ne l’installe pas dans le pays, puisqu’il l’était déjà. (À fortiori s’il compte vendre son ancienne demeure une fois la nouvelle acquise, puisqu’il reste alors avec le même nombre de biens d’habitation). Ce raisonnement se base sur un raisonnement similaire qu’a écrit le Torat ‘Hessed (de Lublin) pour autoriser l’échange de maisons entre un juif et un non juif en Erets Israel : puisque l’interdit consiste à contribuer à installer de manière définitive un idolâtre, qui, auparavant, ne l’était que provisoirement, dans la mesure où cet idolâtre avait déjà une demeure fixe et ne fait que l’échanger contre une autre, il n’y a plus de raison d’interdire !
Autre raison, plus générale, d’autoriser la transaction : selon le Ran, du moins selon la compréhension qu’en a Rabbi Yossef Enguil, il est permis de faire acquérir à l’idolâtre un habitat en Israel, si le juif en tire un avantage. (C’est-à-dire : pas uniquement s’il risque une perte, comme nous l’avons dit plus haut, mais également si la transaction lui rapporte quelque chose). Comme le montre le Yachiv Its’hak, tous ne sont pas d’accord avec cette interprétation du Ran faite par le Rav Engel, mais, s’il y a d’autres raisons d’autoriser, hormis celle-ci, alors on pourra l’associer. |