Question :
celui qui n’a qu’une petite quantité de vin de qualité pour le kidouch, mais dispose d’un autre vin de qualité médiocre : est-il préférable qu’il réserve le bon vin pour le kidouch du matin ou plutôt pour le kidouch du soir ?
Réponse :
Cette question a été traitée, entre autres dans l’ouvrage du Rav Eliahou Lévy Min’hat Eliahou tome 1 chap. 10. Nous allons rapporter ses propos. La source de la réponse se base sur un texte de la massekhet Pessa’him qui traite de beaucoup de sujets liés au kidouch.
La guémara dans Pessa’him daf 105a rapporte une question que Ravina a posé à Rav Na’hman bar Its’hak. Celui qui n’a pas fait le kidouch le soir du chabbat peut-il rattraper son kidouch tout au long de la journée du chabbat ou pas ? Autrement dit, peut-il le lendemain, lire le texte du kidouch du soir lors d’un des repas de la journée ?
Le rav lui a répondu à partir d’un enseignement qui stipule que celui qui n’a pas fait la havdala à la sortie du chabbat peut faire la havdala tout au long de la semaine. Ainsi en sera-t-il de celui qui n’a pas fait le kidouch le soir du chabbat, il pourra faire le texte du kidouch tout au long de la journée. Il faut préciser que le Choul’han Aroukh permet effectivement de rattraper sa havdala en semaine, mais jusqu’au mardi.
Autre chose que l’on peut lire dans cette même guémara : de l’honneur qu’on doit donner au chabbat, le jour et la nuit, c’est celui du jour qui a préséance. C’est-à-dire que celui qui a des mets particuliers, il vaut mieux qu’il les réserve pour la journée du chabbat plutôt que de les consommer le soir, car l’honneur de la journée du chabbat prime sur celui du soir. Cela entraine une halakha très concrète : lorsque je dispose d’un aliment particulier, il vaut mieux le réserver pour la journée que pour le soir.
Mais, ajoute la guémara, celui qui n’a qu’un verre de vin pour le kidouch, il devra l’utiliser pour le kidouch du soir plutôt que pour celui du matin. Or, objecte la guémara, si celui qui n’a pas dit le kidouch du soir peut dire ce kidouch le lendemain, pourquoi ne pas laisser ce vin pour le lendemain, et gagner les deux choses : à la fois le kidouch du soir reporté au matin, et a la fois l’honneur dû à la journée, en réservant ce vin pour la journée !
La guémara répond qu’il est néanmoins préférable de réaliser la mitsva en temps et en heure. « ‘Haviva Mitsva Béchaata », c’est-à-dire la mitsva faite en son temps est plus chère.
Le Roch (Ervé Pessa’him chap ? 13 ) tranche donc que l’honneur de la journée a préséance sur l’honneur du à la nuit. Mais que le kidouch du soir, lui, passe avant l’honneur du au lendemain.
Ainsi tranche aussi le Rambam (chabbat 29,4) mais aussi le Choul’han Aroukh (O.H 271, 3) : si il n’a pas les moyens d’obtenir du vin pour le kidouch, pour le repas du soir, pour le repas du matin, pour le kidouch du matin : le kidouch du soir passe avant les besoins des repas du chabbat. Et avant le kidouch du matin. Et de préciser que lorsque l’on dit que l’honneur du jour passe avant l’honneur de la nuit, cela concerne uniquement les éléments touchants aux repas respectifs. Mais cela ne concerne pas le kidouch, qui, lui, doit être réalisé en temps et en heure.
Il en ressort a priori, que puisque celui qui dispose de mets particuliers doit les réserver pour le jour, il en sera de même s’il dispose d’un vin particulièrement bon : il le réservera pour le lendemain, et utilisera pour le soir le vin de moindre qualité. Car il en va de l’honneur du au chabbat, où la journée prime sur le jour. |