Réponse :
Le Chout Rabénou Guerchom Méor Hagola écrit dans une des Téchouvots qu’étant donné qu’il est écrit dans la Michna qu’il y a quatre débuts d’année, et qu’ils sont énumérés côte à côte, alors ils obéissent à la même loi concernant le jeûne. De fait, de la même manière qu’il est interdit de jeuner lors des autres Roch Hachana, il est interdit de jeuner le Tou Bichvat, qui est aussi un Roch Hachana.
On trouve aussi cette interdiction chez beaucoup d’autres Richonims, avec souvent la même preuve d’ailleurs. Voir Maharam de Rotenbourg (chap.5), Maharam Ben Baroukh (chap. 412), Tachbets Katan (chap. 110) au nom de Rabénou Baroukh, Mordekhay (1er chap. de Roch Hachana), Agouda (1er chap. de Roch Hachana).
Mais c’est surtout ainsi que tranche le Choul’han Aroukh (chap. 572, art. 3).
On pourrait a priori émettre un doute. En effet, il est rapporté au nom des Guéonims, dans le livre Or Zaroua (tome 2, chap. 257) que celui qui pense devoir jeuner le jour de Roch Hachana en a tout à fait le droit. D’autres sources rapportent également cela. Or, si l’on peut jeuner à Roch Hachana, cela implique que l’on puisse le faire également à Tou Bichvat !
En fait, cela ne constitue en rien une difficulté. Car beaucoup d’autres maitres interdisent le jeûne à Roch Hachana, et c’est la Halakha. C’est ainsi que pense le Roch (Roch Hachana chap. 4, 14), ainsi que Rachi dans le Pardess Haguadol (chap. 170) au nom de Rav Yéhouday Guaon. Mais aussi le Manhig (lois de Roch Hachana 1) ou encore le Ribach (chap. 513) et d’autres. Donc, finalement, le raisonnement de Rabbénou Guerchom Méor Haguola à propos de Tou Bichvat tient tout à fait la route.
Il faut préciser que le Chout Beth David (chap. 350) n’est pas d’accord avec tout cela. Il pense que la plupart des décisionnaires, -surtout les principaux à savoir le Roch, le Rif et le Rambam- n’ont pas fait cas de cette interdiction et c’est donc qu’ils autorisent le jeûne à Tou Bichvat. Quant à la preuve rapportée plus haut, à savoir l’énumération de tous les jours de Roch Hachana en une fois, qui impliquerait une similitude dans la Halakha, le Beth David trouve cet argument plutôt faible. Il préfère défendre son avis par d’autres raisonnements, qu’il trouve davantage convaincants.
Même concernant le propos explicitent du Choul’han Aroukh, qui interdisent le jeune à Tou Bichevat, le Beth David n’y voit pas une contradiction avec son avis. En effet, dit-il, ce que le Choul’han Aroukh interdit est la fixation d’un jeûne public, décrété par les autorités du Beth Din. Cela est en effet problématique. Mais un jeûne personnel provenant d’une initiative privée est quant à elle autorisée.
En pratique, il semble que l’avis du Beth David soit minoritaire. Puisqu’il y a des Richonims qui font clairement le parallèle entre Roch Hachana et Tou Bichevat, et que d’autre part beaucoup de maitres ont compris le Choul’han Aroukh selon une compréhension basique que nous avons préalablement évoquée, il est donc davantage raisonnable de ne pas jeûner le jour de Tou Bichevat. Il y a bien d’autres jours où il est possible de jeûner tout au long de l’année.
Il semble toutefois que celui qui souhaite jeûner le jour de Tou Bichevat, pourra effectuer un jeûne de la parole. Il s’agit de ne rien dire autre que des paroles de Torah ou des Téhilims tout au long de la journée. Certains avaient effectivement l’habitude de faire un Taanit Dibour le jour de Tou Bichevat, et c’est un bon usage. Ceci dit, pour une personne qui a une activité professionnelle cela est difficile. Mais pour celui qui ne travaille pas ce jour-là ou qui étudie toute la journée, la chose est tout à fait envisageable. Dans ce cas-là, on dira par exemple des Téhilim. |