Question :
Celui qui possède un aquarium avec des poissons doit – il les nourrir avant de se nourrir lui-même ou pas ?
Réponse :
Le Chout Chvout Yaakov (3e partie, chap. 13) traite de la question de savoir si l’interdiction de manger avant son animal ne concerne que le repas fixe ou concerne aussi le grignotage improvisé. Il explique que cette question est l’objet d’une opposition entre le Beth Yossef et le Taz. Alors que le premier inclut le fait même de gouter dans l’interdiction de se nourrir avant sa bête, le second objecte que l’interdiction a été formulée comme une interdiction de « manger » et non de « gouter ». Mais le Chvout Yaakov remarque que le Taz a apparemment oublié qu’une Guémara dans Guittin (62) infirme ce qu’il dit. Certes, dit-il, un des maitres a tenté de répondre que la Guémara dans Guittin a utilisé un langage moins précis que dans Brakhot car c’est bien Brakhot qui est le traité où le sujet est traité principalement, alors que dans Guittin il n’est mentionné qu’accessoirement. Mais cette réponse ne satisfait pas tellement le Chvout Yaakov, ne serait-ce que pour la simple raison que le Taz aurait dû au moins faire cas de cette autre source, c’était la moindre des choses. Le Chvout Yaakov conclue donc qu’il faut se montrer strict et interdire y compris de gouter avant de donner à son animal. Il étaye sa position par le fait que le Rif tout comme le Roch ont une lecture qui va dans ce sens (qu’il est interdit de gouter).
D’autre part, il affirme, et il n’est pas le seul, qu’il n’y a pas de différence sur ce point entre un animal tel qu’une vache et des volailles, des oiseaux. Et il n’y a pas non plus de différence entre les animaux purs (cachères) et ceux qui ne le sont pas.
Le Chéélat Yabets a été interrogé sur le type d’animal concerné par l’injonction. Il stipule que toutes les sortes d’animaux sont inclus, même si le verset de référence parle de Béhéma. Car le mot Béhéma peut inclure aussi ‘Haya (les animaux moins imposants tels que le chien ou le chat) et même les oiseaux. Il est certes possible que les animaux concernés soient uniquement ceux qui accomplissent un travail, c’est-à-dire ceux qui soient d’utilité domestique. Mais même cet argument n’exclura pas beaucoup d’animaux car quasiment tous les animaux que nous possédons servent à quelque chose. Les chats attaquent les souris, les chiens viellent aux gardiennages de la maison, etc.
Le Chout Michné Halakhot (tome 6, chap.216) aussi va dans ce sens. Il rappelle que selon certains Richonims, comme le Rambam, la raison de la nécessité de nourrir son animal et -pour ne pas faire souffrir l’animal (Tsa’ar Ba’alé ‘Hayim). Or il se trouve qu’au sujet des lois concernant la souffrance animal les poissons aussi font l’objet de l’interdiction. Autre argument du même maitre : certaines sources justifient la priorité animale par le fait que parfois l’homme n’a pas assez de mérite pour être nourri, et que ce n’est que « grâce » à la nécessité de nourrir les animaux qu’il est lui-même nourri. Selon cette explication, donc, il n’y a pas non plus lieu d’établir une différence entre les types d’animaux.
Autre précision : les décisionnaires affirment que certes les animaux ont priorité sur soi-même mais pas sur ses enfants : en effet, tout comme l’alimentation des animaux repose sur le maitre de maison, l’alimentation de ses enfants aussi, et il n’y a pas de raison de ne pas leur donner priorité. Mais attention : le Igrot Moché dit que cette priorité aux enfants n’est valable que si ceux-ci ne savent pas se nourrir d’eux-mêmes. Sion, ils peuvent très bien se servir et l’on donnera priorité aux animaux ! |